Abyssus abyssum invocat ! Le mot « abysse » a pour origine le terme grec abyssos qui signifie « sans fond ». Car longtemps les humains ont considéré l’océan comme un gouffre insondable.

Où commencent les abysses ? Les abysses sont les zones profondes de l’océan où la lumière ne pénètre jamais (à partir de 2 000 m de fond). Les plaines abyssales qui composent la plus grande partie des fonds océaniques se trouvent entre 3 000 et 6 000 mètres de profondeur.

10 912 m : le point le plus profond de l’océan. Des hommes ont cependant réussi par deux fois à descendre au plus profond de l’océan, dans la Fosse des Marianne à l’est des Philippines. Ils ont plongé à près de 11 000 m de profondeur. Qui sont ces héros du fond des mers ? En 1960, ce sont le Suisse Jacques Piccard et l’Américain Don Walsh qui descendent à bord du bathyscaphe Le Trieste. En 2012, James Cameron, réalisateur de Titanic et Abyss découvre à son tour les profondeurs de l’océan à bord du Deepsea Challenger.

Le plastique est partout, même à 11 000 m. La pollution n’épargne pas les profondeurs. Un sac plastique a été retrouvé dans la Fosse des Marianne. 89 % des objets retrouvés sont en matière plastique et souvent à usage unique comme des couverts.

Du corail dans les abysses ! Incroyable ! On trouve des coraux dans les grands fonds. Ces coraux, que l’on appelle des espèces ingénieures, créent par leur activité un nouveau milieu de vie et servent d’habitat à de nombreuses autres espèces comme de jeunes poissons.

Y a quelqu’un, tout en bas ? Les conditions de vie dans les profondeurs de l’océan sont extrêmes : pas de lumière, peu de nourriture, une température glaciale et une pression écrasante ! Elles n’empêchent pas la vie de s’y développer : on y trouve des poissons, des bactéries, des méduses, des invertébrés, des requins.

Et un, et deux…. et 10 millions ! Dix millions, c’est le nombre d’espèces, des bactéries aux plus grands animaux marins, qui pourraient exister dans les abysses. Une diversité biologique au potentiel fascinant et qui reste à découvrir. A peine 2 % des fonds océaniques ont été explorés par des engins sous-marins.

Vivre dans les abysses. Pour vivre dans des conditions aussi extrêmes, il faut s’adapter. Yeux protubérants pour capter le peu de lumière disponible, bioluminescence pour communiquer ou chasser, ou encore pour se camoufler ; gueules énormes aux dents acérées, les animaux des grandes profondeurs sont souvent de petite taille mais ont de quoi effrayer !

Quelle pression sous l’océan ! Sachant qu’à la surface de la mer la pression est en moyenne légèrement supérieure à 1 bar, et qu’elle augmente d’1 bar tous les 10 m de profondeur, quelle est la pression exercée dans les grandes fosses à – 10 000 mètres ? La bonne réponse est 1 000 bars, soit plus d’une tonne par cm², l’équivalent du poids d’une petite voiture sur un timbre-poste !

Menu abyssal : cadavre de baleine sur un lit de pluie de détritus. La quantité de nourriture disponible diminue à mesure que l’on descend dans les profondeurs. Dans les grands fonds, la nourriture se limite à une « pluie » de détritus organiques tombant de la surface. Les animaux qui vivent sur le fond filtrent le sable pour y trouver des restes alimentaires. Quand un cadavre de baleine échoue sur la plaine abyssale, des centaines d’animaux viennent profiter de ce festin providentiel. En prévision d’une disette éventuelle, les animaux charognards constituent des réserves énergétiques et ralentissent leur métabolisme pour faire face aux périodes de jeûnes.

Au début, elle est froide… (dans le fond des océans encore plus) ! Plus on descend dans les profondeurs de l’océan, plus la température de l’eau baisse pour descendre à 2°C à partir de 1 000 m de fond et jusqu’aux plus grandes profondeurs, quelle que soit la région ou la saison. Dans 75 % des eaux océaniques, la température de l’eau oscille entre 0° et 6°C.

Les abysses, c’est chaud ! A certains endroits des abysses, on trouve des sources océaniques dont l’eau s’est réchauffée au contact du magma qui brûle à l’intérieur de la terre jusqu’à atteindre les 400°C.Lorsque l’eau jaillit, les minéraux contenus dans l’eau créent des cheminées hydrothermales qui attirent des espèces endémiques. Une oasis des grands fonds s’y développe. En effet autour de ces sources d’eaux chaudes, des bactéries se développent à des températures pouvant monter jusqu’à 115°C. Le développement des bactéries sert à la chimiosynthèse : les bactéries transforment les composés chimiques de ces eaux brûlantes en sucres assimilables par les espèces abyssales et nécessaires à leur survie.

La vie abyssale est vulnérable. Les abysses ne sont pas épargnés par les activités humaines. La surexploitation des espèces dans les grands fonds est une menace. Le changement climatique qui entraîne une hausse de la température des eaux affecte aussi la vie abyssale.

Les abysses, un potentiel à préserver ! Le potentiel des abysses, cet écosystème encore peu connu est énorme : biodiversité, molécules d’intérêt thérapeutique et ressources minérales. Par conséquent, leur exploitation doit être raisonnée et contrôlée afin de bénéficier à tous. Le fond de l’océan et le sous-sol en haute mer, qui constituent ce que l’on appelle « La Zone », ont été déclarés Patrimoine commun de l’humanité. L’Autorité internationale des fonds marins, organisme intergouvernemental autonome créé sous l’égide des Nations Unies en 1994 contrôle les activités relatives aux ressources minérales des fonds marins dans la zone internationale hors des limites de la juridiction nationale (zone économique exclusive).

Nausicaa

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